Tunisie : Halte aux condamnations et poursuites à l’encontre des journalistes et internautes

Tunisie : Halte aux condamnations et poursuites à l’encontre des journalistes et internautes - Media

ARTICLE 19 exprime sa profonde préoccupation face à la détérioration de la liberté d’expression en Tunisie, marquée par une recrudescence des condamnations1 ARTICLE 19 condamne la décision de la Cour d’appel à l’encontre du journaliste Khalifa Guesmi pour avoir exercé légitimement ses fonctions professionnelles: https://www.article19.org/resources/tunisia-acquit-journalist-and-protect-journalists-sources/, arrestations2 Le directeur de Radio Mosaïque FM doit être libéré immédiatement : https://www.article19.org/resources/tunisia-director-of-radio-mosaique-fm-must-be-released-immediately/ et des poursuites3 L’ouverture d’une enquête sur le travail des journalistes Monia Arfaoui et Mohamed Boughlab : https://www.article19.org/resources/tunisia-government-drop-policy-of-undermining-press-freedom/ contre les journalistes, ainsi que les utilisateurs des réseaux sociaux – tous devenus systématiques. L’exemple le plus récent de cette agression a été l’arrestation de deux étudiants et l’interpellation de deux journalistes. Les autorités de poursuite tunisiennes doivent immédiatement retirer les charges retenues contre eux, qui sont fondées sur des dispositions du Code pénal, du Code des télécommunications et du décret-loi n° 2022-54.

L’organisation condamne fermement la détention de deux étudiants, Dhia Nassir et Youssef Chalbi, âgés de 26 et 27 ans. Ils ont été arrêtés le 15 mai 2023 et placés en garde à vue, puis sous mandat de dépôt par le tribunal de première instance de Nabeul le 16 mai 2023. Leur comparution est prévue mardi prochain, selon les déclarations de l’avocate Imen Souissi. 

Cette détention fait suite à leur publication d’une chanson satirique sur les réseaux sociaux. Ils sont de poursuivis pour atteinte à autrui sur les réseaux sociaux en vertu de l’article 86 du code des télécommunication ainsi que pour imputation de faits illégaux à un agent public en vertu de l’article 128 du code pénal. Ils encourent une peine pouvant aller jusqu’à 4 ans de prison ferme. ARTICLE19 estime que cette arrestation est totalement injustifiée et disproportionnée par rapport à la nature de l’acte commis. 

ARTICLE 19 suit également avec une profonde préoccupation la plainte déposée contre deux journalistes, Haythem El Mekki et Elyes et Gharbi, en réponse aux commentaires qu’ils ont tenus dans l’émission Midi Show, diffusée sur Mosaïque FM le 15 mai.  Selon l’avocate, Dalila Ben Mbarek, la plainte porte sur des accusations de diffamation- en vertu de l’article 245- du Code pénal et sur des accusations de propagation de rumeurs affectant la sécurité intérieure -en vertu de l’article 24 du décret-loi n° 2022-54.

ARTICLE 19 exprime sa consternation face à la poursuite de l’application des dispositions du Code pénal, du Code des télécommunications et du décret-loi n° 2022-54 dans les affaires relatives à la liberté d’expression, notamment parce qu’il serait plus approprié d’appliquer le décret-loi 115 sur la liberté de la presse, dont les dispositions sont plus conformes aux normes internationales, dans ces cas.  Nous considérons également que ces arrestations et poursuites sont fondées sur des motifs juridiques qui constituent une violation flagrante des engagements internationaux de la Tunisie et constituent donc une atteinte systématique à la liberté d’expression et de la presse. 

Nous appelons les autorités chargées des poursuites tunisiennes à retirer immédiatement les charges retenues contre les journalistes et les internautes, qui reposent sur des dispositions obsolètes qui criminalisent et répriment la liberté d’expression et de la presse.  Les autorités doivent respecter ces droits conformément à la Constitution et aux obligations qui lui incombent en vertu des standards et normes internationaux.